Mommy (2014)

Mommy

Réalisé par Xavier Dolan

Avec Anne Dorval, Suzanne Clément, Antoine-Olivier Pilon
Pays:   Canada
Genres : Drame
Durée : 2 h 18 min
Année de production : 2014
7/10

Afficher l'image d'origineC‘est le festival de Cannes, quoi de mieux que de découvrir un réalisateur en pleine émergence pour se faire une idée de son talent tant annoncé. 25 ans et déjà 5 films, respect. Mais que donne Mommy, le film de Xavier Dolan, à ce jour le plus médiatisé?

Mommy est un film débordant d’émotions. Entre amour, violence, tendresse et insultes, une mère et son fils ont du mal à se comprendre et pourtant ils s’aiment. Animé par des troubles du déficit de l’attention avec hyperactivité, Mommy est par moments d’une noirceur incroyable. La lucidité amère sur le handicape et sa gestion complexe dévoile un scénario équivoque qui peut basculer à chaque instant. Steve est instable, tout le devient avec. Irresponsable et dangereux, il fait fluctuer nos sentiments nous laissant souvent sous tension présageant le pire, même quand tout va bien.

Les relations entre les personnages sont eux aussi ambiguës. La relation de Steve et sa mère est tendancieuse et quand la voisine intervient on se dit que Xavier Dolan aurait pu être encore plus pervers et avait matière à rendre le malaise plus intense, plus insoutenable. A savoir que le trio d’acteurs est remarquable. Anne Dorval, Suzanne Clément et bien entendu le jeune et Antoine-Olivier Pilon portent remarquablement l’intrigue rendant l’œuvre touchante et réaliste. Jamais on ne doute de leur sincérité. Seule la scène dans le supermarché est mal amenée laissant notre jeune Steve à terre, nous laissant dans le doute entre vengeance d’un tiers ou d’un acte solitaire, qui s’éclaircira quelques minutes plus tard. Malheureusement, le film traine en longueur sur le dernier quart d’heure et amoindrit l’effet escompté. Même si indispensable, son traitement ne sera pas à la hauteur du reste du film. Au final on est plus dans un constat avec une image forte, ouverte à interprétation même si relativement bien orientée, que dans une insoutenable réflexion ou affliction.

Point de vue technique, commençons par les dialogues. Et bien sans sous-titres, vous ne comprendrez rien, on est loin d’une variante du français. Le « joual » est un dialecte larvaire, informe dont l’armature syntaxique est bancale mais encore présent dans la culture populaire de Montréal. Si on a essayé de comprendre cet argot pseudo-québécois, on s’est vite résigné à lire les sous-titres tellement c’est incompréhensible. Mais le charme de la langue rendant certains dialogues intenses mérite de tirer l’oreille. Une façon à Dolan d’offrir à son œuvre une véritable valeur identitaire et personnelle. De plus, la carence linguistique qui s’en dégage fait écho à une certaine carence affective dont souffre le jeune Steve et sa maman. Et du coté de l’image qu’en est-il? Et bien Mommy est présenté au format carré 1:1, rien que l’idée peut déranger. Attaqué un film sous ce format est au premier abord incommodant. La volonté est bonne et même réussie. Dès lors où l’image, sur un court instant, prend de l’ampleur en 16:9, notre enfermement dans ce cadre restreint n’est plus, on ressent une certaine liberté face à la grandeur du cadre, équivalant au ressenti de notre héros. Alors qu’on pourrait penser le film amateur à cause d’un vulgaire format qui pourrait être un frein pour découvrir une œuvre contemporaine, au final on comprend son utilité. La réalisation quant à elle est maitrisée, même si le montage est un peu haché proposant quelques facilités. Xavier Dolan abusera de ralentis et de flous-nets aux allures « clipesques » afin de générer de l’esthétique autant que de l’émotion, faisant perdre l’aspect naturel de certaines séquences. Accompagné par de la bande originale connue telle que du Céline Dion ou du Oasis, les envolés de Steve deviennent ainsi par facilité plus majestueuses. La musique de la dernière séquence est judicieuse et encore plus quand on analyse son titre Born to Die, une allégorie parmi tant d’autres dont le surnom caractéristique de la mère qui ne nous aura pas échappé: Die!

Drame social, Mommy possède certes un paraître simpliste mais aborde une multitude de thématique. Sa réalisation exclusive, ses images recadrées, sa syntaxe linguistique d’un autre temps, Mommy révèle des émotions qui arrivent à nous mettre à fleur de peau. Même si Xavier Dolan avait la capacité de rendre son œuvre encore plus perverse, il dépeint ses personnages avec justesse grâce à l’interprétation brillante de son protagoniste principal malade mais attachant.

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